Composition,
interprétation et figuralisme dans la musique du عود(‘ûd) [luth arabo-oriental] de concert
Analyse auditive de l'abri d'al-Amiriyya
de Naseer Shamma
3.
Niveaux de segmentation de l'œuvre : compréhension de la stratégie
compositionnelle
3.2.
Deuxième niveau :
Segmentation de E, F et G
Dans
la même direction analytique de cet article, nous passons à un deuxième
niveau de segmentation plus détaillé. Celui-ci consiste à effectuer un
nouveau découpage des segments déjà prédéfinies dans le premier schéma
ci-haut. Je m’intéresserai uniquement à une partie compositionnelle et
interprétative qui se montre innovante et inhabituelle quant à la
pratique générale du عود (‘ûd) :
cela correspond bien à la deuxième section du spectre
harmonique
correspondant aux segments E, F et G colorés en jaune dans la première
figure. La segmentation de cette section, obéissant aux mêmes
paramètres d’écoute déjà cités plus haut, aboutit à la réalisation du
schéma suivant :
Fig.3 : Segmentation de 2 de la représentation spectrale de l’œuvre
Ce schéma nous montre une disposition
particulière
de plusieurs segments de différentes durées. Nous pouvons classer ces
segments comme suit :
Segments de longues durées
Segments de moyennes durées
Segments de courtes durées
1, 9
2, 7, 8, 16
3, 4, 5, 6, 10, 11, 12, 13, 14, 15
Tableau N°3
Les
segments de longues durées semblent
découper cette partie en deux phases :
* une première phase relativement
lente, doté d’éléments musicaux nouveaux et peu redondants (du segment
1 au segment 8) ;
*
une deuxième phase relativement rapide grâce à l’apparition de
plusieurs éléments musicaux nouveaux plutôt courts en terme de durée et
enchaînés avec un nombre de redondances plus important (du segment 9 au
segment 16).
Dans
cette partie, Shamma utilise un ensemble de techniques instrumentales
entremêlées de façon à produire une qualité sonore nouvelle. Une
remarquable dynamique dans l’interprétation est mise en valeur. Le
premier segment s’impose à l’écoute avec un glissando, à la fois sec et
souple, renforcé par un trémolo qui montre le son percussif résultant
du frottement du plectre sur la corde. Le neuvième segment s’avère
aussi important que le premier puisqu’on emploie la même technique avec
une petite différence : la corde est légèrement effleurée ce
qui
donne un son étouffé mettant en valeur les harmoniques de cette corde.
Le crescendo très patent dans ce segment favorise le fortissimo de
l’enchaînement qui suit. Cette dynamique peut être montré
par la
représentation de l'enveloppe du deploiement spectral
de
l'energie dans la figure suivante :
Fig.4 : représentation schématique de l'enveloppe
du déploiement spectral de l'energie dans la deuxième section de l’œuvre (spectral view in Audacity)
Sur
le plan mélodique, on note une utilisation totale du mode mineur
réalisé par des accords et des arpèges ainsi qu’une présence d’un
chromatisme permanent, défini par des glissandi ou par des mouvements
de notes conjointes. Sur le plan rythmique, il n’y a pas de symétrie
cyclique proprement dite. On entend plutôt un ensemble de frappes
dispersées et accentuées par les réitérations des petits phrasés
signalés
plus haut dans la deuxième phase.