2. L'analyse sémiologique de la musique électroacoustique

2.6 Le niveau neutre dans l'analyse sémiologique de la musique électroacoustique

La question du niveau neutre dans le domaine électroacoustique est problématique.

Dans la musique instrumentale, on peut analyser une partition car celle-ci contient un ensemble de symboles que l'on peut examiner indépendamment du pôle poïétique ou esthésique. On peut alors faire ensuite des liens avec les autres pôles de la tripartition, comme repérer des éléments au niveau de la partition pour examiner ensuite si ils sont pertinents d'un point de vue auditif. C'est d'ailleurs le projet de l'esthésique inductive.

Cependant, dans l'analyse sémiologique de la musique électroacoustique, on ne peut rien évaluer au niveau neutre. L'enregistrement sonore n'est rien qu'un support physique ou numérique. Sans un lecteur qui permettra à l'auditeur d'écouter l'œuvre, l'enregistrement sonore ne donne rien à voir ou à entendre. Le couple enregistrement sonore/lecteur fait immédiatement passer l'analyste du niveau neutre vers le pôle esthésique. Dans l'analyse esthésique inductive de la musique électroacoustique, il n'existe donc qu'un seul pôle effectif, c'est celui de la perception.

Le pôle poïétique peut être envisagé, mais il faut que l'analyste ait à sa disposition soit des documents de type poïétique, soit des outils multimédia qui lui permettent de révéler certains processus compositionnels.

Sans le niveau neutre, le projet de l'analyse sémiologique est impossible :

« L'objectif de l'analyse sémiologique consiste à faire émerger des significations à partir de ces trois pôles[1] et à voir comment ces significations peuvent entrer en relation les unes avec les autres. »[2]

Ce qui est possible avec la musique de partition se révèle problématique avec la musique électroacoustique. J'ai donc remis en cause le projet de réaliser une transcription de Gesang der Jünglinge et de Thema (Omaggio a Joyce) sur la base d'une sémiologie musicale.

 

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[1] Il s'agit des pôles poïétique, neutre et esthésique.

[2] Roy Stéphane, L'analyse des musiques électroacoustiques : Modèles et propositions, Édition L'Harmattan, 2003, p.25.


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