Le cycle des Espaces acoustiques est un voyage, et on pourrait être d’accord avec Pierre-André Valade quand il le qualifie d’initiatique. D’une cantilène monodique suggestive (Prologue) on arrive à la version transfigurée (quatre cors et orchestre) du même geste qui n’est qu’une image stylisée du modèle sonore ayant inspiré la pensée de Grisey jusqu’à ses dernières œuvres. La connaissance par le chef d’orchestre des idées poétiques du compositeur et leur partage total avec ses musiciens est une partie fondamentale du parcours qui, une fois les aspects les plus techniques surmontées, s’ouvre vers la création du sens musical : le véritable lieu de la magie de toute exécution réussie, au moment précis où l’harmonie mutuelle entre tous les participants impliqués est atteinte, y compris avec le public. Ce moment donne un sens au long parcours d’étude et de préparation du chef d’orchestre et des musiciens. Les traces que ces actions laissent sur le matériau (conducteur et parties instrumentales) sont les traces d’un processus alchimique qui fait partie de la nature même de l’exécution musicale. Ce sont des traces qui témoignent de pratiques, d’habitudes, de visions interprétatives et de méthodologies d’une œuvre située dans un contexte culturel précis et à un moment spécifique dans le temps que nous avons eu le privilège, en tant que groupe d’étude, de documenter et d’illustrer par nos réflexions. Nous espérons que ce matériel servira un jour de point de départ à de nombreuses autres aventures scéniques et théoriques qu’un cycle aussi monumental que Les espaces acoustiques ne cessera jamais de stimuler.