La berceuse est la dernière partie de l’œuvre ; c’est un mouvement absolument génial.
C’est un mouvement de balancement, naturel comme Grisey sait faire de la musique naturelle. [Chantonne le profil mélodique en battant la mesure pour les deux premières pages (sauf mes. 7-8, seulement métrique).]
Les battues sont soit de trois croches, soit de deux croches. Rien que dans la première mesure, tout le système est visible : [bat et solfie le début de la mes. 1] Mi Do Mi Do… cela fait trois croches [chantonne], puis ce sont des battues de 2 croches [bat et compte à voix haute], au sein des quelles se trouve cette fois un triolet : [bat et chantonne]. Et ici [pointe la fin de la mes. 1], pour la dernière battue – semblable à la première –, il n’y a plus que deux notes : ce sont non plus trois croches mais deux croches pointées [bat et chantonne].
Cela n’a l’air de rien mais c’est difficile : il ne faut vraiment pas se tromper mentalement. En même temps, il ne faut pas le faire mécaniquement, mais musicalement. Il faut sentir le jeu entre la métrique de la battue et le rapport de valeur proposé à l’intérieur de cette métrique. Il faut le travailler vraiment et le connaître de façon à pouvoir équilibrer ces battues en fonction d’une phrase musicale que l’on sait être exacte. Si on le fait mécaniquement, si je compte [bat et compte à voix haute] un-deux-trois un-deux un-deux un-deux-trois un-deux-trois un-deux…, c’est un désastre total. Ce sera en place mais ce sera terrible. On ne peut donc pas le faire comme cela. Il faut le faire beaucoup plus souplement, tout en ayant bien présent au mental le rapport de la phrase et de la battue : [bat et chantonne mes. 1-3] ; et cela change [poursuit, mes. 4] : subitement, la levée [fin mes. 4] n’est plus [bat et chantonne], mais [bat et chantonne] – c’est une battue courte.
Ensuite cela ralentit [mes. 6]. Puis [mes. 7] on revient a tempo, cela s’accélère [geste], puis [autre geste] a tempo de nouveau – toujours ce balancement –, et puis : [bat et chantonne]. [feuillette]